C’est l’histoire d’un souvenir. Une lointaine réminiscence de l’enfance. Un parfum disparu mais ici restitué un peu comme un fantôme, comme un fantasme. Christophe LeBo, fondateur de la maison LeBo Parfums qui porte son nom, a souhaité, tel Proust et sa madeleine, retrouver l’odeur de sa grand-mère. Pas l’extrait qui trônait sur sa coiffeuse mais le goût précis de ses joues lorsqu’elle le prenait dans ses bras et lui chantait les chansons bretonnes de sa jeunesse à elle, née au début du XXe siècle au bout du Finistère.
Cette odeur, il ne le savait pas encore, était pourtant bien celle d’une fragrance : celle de la poudre de riz dont, coquette, la vieille dame voilait ses rides. Cela sentait la rose, fleur emblématique de cette région côtière au microclimat où poussent même de splendides palmiers. Des roses comme s’il en pleuvait autant que les giboulées, de ces roses que l’on y trouvait en chaque jardin, des roses douces et apaisantes au cœur du petit garçon, des roses comme des caresses, comme de l’essence de tendresse. Et puis, et puis, au cœur de ce fard pulvérulent, il y avait aussi le parfum de l’iris. Ou du moins du rhizome d’iris, l’authentique, le plus noble, qu’on arrache aux pierres de Toscane et que l’on laisse ensuite vieillir pendant au minimum trois ans, telle une grande liqueur. L’iris florentin, avec ses élans à bas bruit, souterrains (si l’on y fait attention, on y distingue parfois quelques aspects de… carotte), suprêmement élégants dont l’odeur « mate » apportait depuis le XVe siècle et Catherine de Médicis, son caractère à cette poudre de riz qu’aujourd’hui hélas plus personne ne porte. Un souvenir, en effet…